Écrit par
Maître Elodie DUCREY‑BOMPARD
Informations pratiques

DROIT PUBLIC – DROIT ADMINISTRATIF – URBANISME – DROIT PENAL – PROCEDURE PENALE

Vous avez pris quelques libertés avec le droit de l’urbanisme et souhaitez connaitre le délai dans lequel vous pouvez être poursuivi pénalement pour ces faits? Votre voisin a commis une infraction d’urbanisme, qui vous cause un préjudice et vous souhaitez que la justice pénale se saisisse de tels faits, mais vous craignez une prescription de l’action?

Votre avocat vous informe.

Depuis la réforme de la prescription en matière pénale, issue de loi n°2017-242 du 27 février 2017, le délai de prescription de l’action publique en matière criminelle et délictuelle est doublé.

En conséquence, les infractions d’urbanisme sont prescrites à l’issue d’un délai de six années, et non plus de trois années, comme auparavant.

Ce principe, assez simple, défini, plusieurs questions, plus redoutables, se posent.

  • En premier lieu, la date d’entrée en vigueur de la réforme

Il résulte de l’article 112-2 4° du code pénal que : « sont applicables immédiatement à la répression des infractions commises avant leur entrée en vigueur : (…) 4° Lorsque les prescriptions ne sont pas acquises, les lois relatives à la prescription de l’action publique et à la prescription des peines ».

Autrement dit, l’application immédiate d’une loi nouvelle relative à la prescription de l’action publique est subordonnée à l’absence de toute prescription acquise au moment de son entrée en vigueur (l’infraction était-elle déjà prescrite à la date d’entrée en vigueur de la loi nouvelle?).

La jurisprudence a rappelé que, cela va de soi, la question de savoir  si la prescription est ou non acquise doit s’apprécier « sous l’empire de la loi ancienne » afin d’apprécier (Cass. crim., 26 mars 1997, n°97-80086).

- Dans l’affirmative: la loi nouvelle – même allongeant le délai de prescription – ne peut s’appliquer à une action publique éteinte par prescription en vertu du droit antérieur (Crim., 3 novembre 1994, n°94-80010).

- A l’inverse: si la prescription n’était pas acquise sous le régime antérieur, alors la loi nouvelle pourra s’appliquer, qu’elle réduise ou qu’elle rallonge le délai de prescription.

  • En second lieu, le point de départ du délai de prescription

La loi du 27 février 2017 innove en ce qu’elle institue un délai butoir.

Jusqu’alors, si la loi fixait le point de départ du délai de prescription au jour de la commission de l’infraction (sous réserve de quelques exceptions), s’était parallèlement développée une jurisprudence relativement aux infractions dites occultes ou dissimulées qui reportait le point de départ du délai de prescription « au jour où l’infraction est apparue et a été constatée dans des conditions permettant la mise en mouvement ou l’exercice de l’action publique ».

La réforme maintient cette dichotomie tout en instaurant un délai butoir pour les infractions dites clandestines, afin d’éviter une imprescriptibilité de fait :

- Réaffirmation du principe selon lequel le point de départ du délai de prescription est le jour de la commission de l’infraction ;

- Report report du point de départ du délai de prescription pour les infractions dites occultes ou dissimulées « à compter du jour où l’infraction est apparue et a pu être constatée dans des conditions permettant la mise en mouvement ou l’exercice de l’action publique »

- Ce report étant encadré dans un « délai butoir » de 12 ans en matière délictuelle et 30 ans en matière criminelle .

La loi définit l’infraction occulte en ces termes: « Est occulte, l’infraction qui, en raison de ses éléments constitutifs, ne peut être connue ni de la victime ni de l’autorité judiciaire » (C. pr. pén., art. 9-1, al.4 ).

Une infraction d’urbanisme répondant difficilement à une telle définition, le point de départ sera, presque toujours, celui de la date de commission de l’infraction, soit la date d’achèvement des travaux.